COMMUNAUTE D’AGGLOMERATION DE CERGY PONTOISE
Conseil Communautaire du 29 mars 2005
Intervention du groupe Vert relative au Plan de Protection de l'Atmosphère
Monsieur le Président,
Chers collègues,
A la satisfaction des élus du Groupe Vert, la délibération portant sur l'avis de la CACP à propos du projet de Plan de Protection de l'Atmosphère fait l'objet d'un débat en séance. Le sujet et sérieux, d'importance, il ne pouvait en être autrement.
Le PPA est un texte important.
Parce qu'il devrait être un outil au service de la qualité de l'air respiré par les Franciliens. Il devrait être un outil permettant de "garantir à chacun un air qui ne nuise pas à sa santé.", pour reprendre l'objectif principal de la loi sur l'air qui institua les PPA Or, l'air que les Franciliens respirent n'est pas sain.
En mai dernier, l'Agence française de sécurité sanitaire et environnementale publiait une étude qui montrait le lien direct entre la pollution athmosphérique et les maladies respiratoires. Pis, elle estimait que cette pollution était à l'origine d'au moins 5000 décès annuels, à 7 % des maladies cardio-vasculaires et à environ 10 % des cancers du poumon chez les sujets de plus de 30 ans ! En fait, la pollution tue plus que la route.
Le Plan de Protection de l'Atmosphère est sensé remédier à cette mauvaise qualité de l'air en prenant un certain nombre de mesures permanentes ou en cas de pics de pollution en coordination avec les autres plans prévus dans la loi sur l'Air que sont le Plan Régional de Qualité de l'Air adopté en Ile-de-France en mai 2000 et au Plan de Déplacement régional arrêté en décembre 2000.
Il aura donc fallu quatre ans de plus à la DRIRE pour élaborer le PPA de notre région, plan qui est sensé permettre le respect des normes admissibles de polluants locaux définis dans le décret du 6 mai 1998. Quatre ans de travail pour en arriver là !
Nous savons d'ores et déjà que le PPA ne permettra pas de respecter les normes environnementales qui seront en vigueur en 2010. Cela du fait d'une vision par trop optimiste, pour ne pas dire béate des évolutions technologiques sensées régler "au fil de l'eau" comme le dit poétiquement le document, les questions de pollutions. Mais aussi d'une absence sidérante de mesures contraignantes pour faire respecter les normes, et enfin d'une absence de prise en compte dans les scenarii proposés de tous les pollueurs, y compris par exemple l'agriculture et l'industrie. Excusez du peu !
Il convient de remarquer que la démarche précisée ci-dessus concerne exclusivement les actions portant sur les polluants réglementés, notamment les oxydes d’azote, les particules, l’ozone et ses précurseurs, posant des problèmes de santé publique en Région Ile-de-France. Il ne s’intéresse pas aux autres polluants qui posent eux aussi des problèmes croissants de santé publique.
Or, le décret du 25 mai 2001 relatif aux PPA et aux mesures pouvant être mises en œuvre pour réduire les émission de sources de pollutions atmosphériques prévoit, dans son article 4.II que « le plan peut renforcer les objectifs définis dans l’annexe I du décret 98-360 du 6 mai 1998 susvisé». Il aurait donc pu se fixer des objectifs plus ambitieux que le strict respect des normes maximales définies il y a huit ans. Dans ce domaine, les connaissances scientifiques font apparaître régulièrement de nouveaux polluants ou des effets des polluants connus à de plus faibles doses. Le PPA ne saisit pas cette occasion d’anticiper dans ces domaines.
De plus, la loi sur l'Air oblige à une cohérence entre les trois différents textes de planification que sont le PRQA, le PDUIF et le PPA. Or, si le PDUIF prévoit d'ici 2010 une réduction de 5 % de la circulation automobile dans la région, le PPA table lui sur une augmentation de 10 %.
Quelle incohérence !
On voit à quoi mène la politique du "fil de l'eau" : à un manque d'ambitions caractérisé en matière de limitation d'une des causes principales de la pollution : la circulation automobile. On pourrait encore multiplier les griefs vis-à-vis de ce plan : il intègre des mesures d'encouragement à l'achat de matériels moins polluants pour les chaudières individuelles, mais ne parle pas de mode de financement, et n'intègre pas la définition précise des seuils d'alerte en cas de pics de pollution alors que c'est là une de ses missions principales.
Aussi, le Groupe Vert se range à l'avis presenté ce soir. La CACP, eu égard aux lacunes de ce texte face aux enjeux de la pollution atmosphérique, ne peut donner un avis favorable aux formulations actuelles de Plan de Protection de l'Atmosphère.
La CACP pourrait proposer un certain nombre d'amendements pour rendre ce PPA conforme à ce qu'il devrait être. En voici quelques exemples :
Mesure réglementaire n° 1 :
Plafonnement des émissions d’oxydes d’azote de toutes les sources mobiles pour des grandes entreprises, zones d’activités, zones aéroportuaires, collectivités ou administrations.
La mesure porte sur deux aspects : l’évolution technologique des flottes et l’élaboration de plans de déplacements des employés des entreprises (PDE) pour les établissements ou zones d’emplois regroupant plus de 5000 salariés.
Elle propose de «réglementer et/ou de négocier avec les établissements publics ou privés et de «faire appel au volontariat avant d’envisager sa généralisation en 2008».
Sur les conditions d’application de cette mesure, la CACP pourrait proposer l’amendement suivant :
«L’action réglementaire ne peut pas tenir compte du seul volontariat des entreprises. Il est proposé que soient supprimées dans le texte du PPA, les formules : «et/ou de négocier cette clause» et «faire appel au volontariat».
Mesure d’accompagnement 1 :
Développement et amélioration de la qualité (fiabilité, sécurité, propreté) des transports en commun, notamment banlieue-banlieue. Il s’agit de constituer à terme une alternative crédible et efficace à l’automobile particulière.
Un tel document se devrait d’insister davantage sur le développement des transports collectifs non seulement en qualité mais aussi en quantité (non indiqué dans le titre de la mesure d’accompagnement n°1), en préconisant l’accélération de la mise en œuvre du PDU et du Contrat de plan, en développement l’implantation des parcs de stationnement relais, en construisant des voies dédiées aux bus notamment pour accéder aux aéroports, en reconsidérant totalement la tarification des transports collectifs qui est excessive…. Il se devrait de stigmatiser les retards en matière de transport en commun, consécutif à l’incapacité de l’Etat à suivre ses engagements du Contrat de plan, qui ont un impact négatif sur la qualité de l’air et par voie de conséquence sur la santé. Le transport par fret est ignoré alors même qu’il est une cause très importante de la dégradation de la qualité de l’air. Des mesures réglementaires doivent être ajoutées sur le fret.
Mesure réglementaire n° 3 :
1. Zone de protection spéciale (ZPS) Ile-de-France : extension à la zone Z2 des dispositions de l’article 9 (utilisation fioul TTBTS) à toute l’Ile de France des articles 22 (groupes électrogènes) et 23 (brûlage du bois) de l’arrêté ZPS ;
2. Anticipation de certaines échéances des arrêtés GIC du 20 juin 2002 et du 30 juillet 2003.
Le volet 1 de cette mesure est de loin la mesure quantifiable du PPA la plus intéressante pour ce qui concerne la baisse émissions de NOx en 2010 : nette diminution dans les secteurs de la combustion industrielle et surtout de la production d’électricité.
Quant au volet 2, l’anticipation de certaines échéances des arrêtés GIC (introduction de dispositions contraignantes relatives aux émissions de NOx dans les Grandes Installations de Combustion) paraît peu réaliste, étant donné les conditions réglementaires de passation des marchés. De plus, elle ne laisse pas le temps d’imaginer d’autres solutions (travail sur la partie amont que constitue le combustible et le procédé de combustion) mais au contraire elle contraint à ne travailler que l’aval (simple mise en œuvre de procédés de dépollution).
Il est précisé dans l’article que la combustion du bois commercialement sec est autorisée, à condition qu’elle ne provoque pas de nuisance dans le voisinage, dans les deux cas suivants :
- installations de chauffage au bois automatisées de puissance inférieure à 2 MWth et conformes aux prescriptions de l’arrêté du 25 juillet 1997 ;
- installations classées de combustion soumises à déclaration ou à autorisation au titre de la rubrique 2910 (combustion), conformément aux prescriptions de l’arrêté du 25 juillet 1997 et de l’arrêté du 20 juin 2002.
Ces dispositions, introduites par la DRIRE à la demande de la Région et de l’ADEME, confortent la valorisation énergétique du bois dans les chaufferies automatisées.
Cependant, il ne nous apparaît pas opportun de mentionner un seuil de puissance inférieur à 2 MW, l’offre technologique des constructeurs pouvant aller bien au-delà.
Sur cette mesure, la CACP pourrait proposer l’amendement réglementaire suivant :
« Supprimer la référence au seuil de puissance de 2 MWth pour les installations de chauffage au bois automatisées»
« Supprimer le volet 2 de la mesure »
Par ailleurs, la CACP pourrait demander que soient intégrées au PPA les conditions d’application de la loi du 15 juillet 1980 relative aux économies d’énergie et aux réseaux de distribution de chaleur. Sur cette base, elle pourrait proposer la recommandation suivante :
«Le PPA doit inciter à la limitation des petites et moyennes unités de climatisation et de chauffage, par la généralisation de la recommandation de consulter, avant toute installation d’unité nouvelle, les concessionnaires des réseaux existants de production de chaleur et de froid, partout où le raccordement à ces réseaux est techniquement possible. Sur la question spécifique des climatisations, la CACP demande que le PPA intègre des mesures d’interdiction ou, pour le moins, de limitation de leur développement, en particulier dès lors que la surconsommation énergétique de ces installations est avérée».
Elle entend limiter l’extension de l’équipement en climatiseurs utilisant des gaz à très fort potentiel en gaz à effet de serre (1300 fois le CO2) en favorisant l’architecture bioclimatique ou la bonne conception architecturale qui ne devrait pas rendre nécessaire la climatisation sous nos latitudes.
Mesure réglementaire n° 4 :
Chaudières d’une puissance inférieure à 400 kilowatts (< 400 kW) :
1. Obligation pour toute chaudière neuve de disposer d’un brûleur bas NOx.
2. Incitation au renouvellement des chaudières individuelles (moins de 70 kW) de plus de 10 ans ;
3. Possibilité d’aide au diagnostic des chaudières de plus de 70 kW ;
4. Extension de l’obligation de disposer d’un livret de maintenance à toutes chaudières de moins de 70 kW.
Pour les chaudières de 70 à 400 kW, il n’est envisagé que d’étudier la faisabilité d’implanter des brûleurs bas NOx.
Il est tout autant opportun de rendre obligatoire l’installation de brûleurs « bas NOx » sur les chaudières de 70 à 400 kW du secteur de l’habitat collectif et du tertiaire que sur la gamme de puissance < 70 kW (chaudières individuelles). En effet, la zone sensible NOx francilien concentre un parc essentiellement constitué de chaudières implantées dans le secteur de l’habitat collectif et du tertiaire. De plus, il n’ y a aucune raison pour que seuls les réseaux de chaleur soient les seuls à supporter cet effort environnemental, alors que l’on sait l’impact environnemental d’un réseau de chaleur de 1000 logements est nettement plus faible que celui de 1000 logements en chauffage individuels. Il y a là une question d’équité concurrentielle.
Sur cette mesure, la CACP pourrait proposer l’amendement réglementaire suivant :
« Rendre obligatoire l’installation de brûleurs « bas NOx » sur les chaudières jusqu’ à 400 kW du secteur de l’habitat collectif et du tertiaire »
Il convient par ailleurs de remarquer que l’énergie la moins polluante étant celle qui n’est pas utilisée des chaudières bas NOx ne doivent pas occulter les nécessaires politiques de maîtrise de l’énergie ou, par exemple, la production d’eau chaude à partir de systèmes solaires.
Au titre des propositions de mesures réglementaires supplémentaires, il apparaît nécessaire de prendre en compte deux aspects rentrant dans la définition d'actions des PPA mais qui n'ont pas été envisagés par la DRIRE. Il s'agit de la pollution de l'air intérieur des bâtiments et de leur consommation électrique. Nous proposons donc d'obliger les propriétaires de bâtiments ou de lots de bâtiments à effectuer à leur frais, un bilan énergétique et de la qualité de l'air intérieur après toutes constructions et réhabilitations et avant toute vente ou location.
Au titre des mesures contractuelles, je propose au nom du Groupe Vert un certain nombre de mesures relatives au transport aérien, gros producteur d'oxydes d'azote, de composés organiques volatils. En premier lieu, il s'agirait de rendre obligatoire et permanente la mesure prévue uniquement en cas de pic de pollution visant "à faire un meilleur usage des installations et engins de servitude des aéroports, de sensibiliser les salariés et les passagers aux mesures à prendre pour limiter la pollution."
Une deuxième proposition concernant toujours la mesure contractuelle n°1 vise à demander un plafonnement des mouvements d'aéronefs non seulement sur les deux plus grands aéroports parisiens et sur l'héliport d'Issy, comme le propose la délibération, mais aussi dans tous les autres aéroports et héliports franciliens.
Monsieur le Président,
Chers Collègues,
Je vous remercie.